Urban Climbing par Marcassin en 03-2003
La grimpe urbaine à Toulouse: Avant l’avènement des salles d’escalade et autres murs intérieurs sur Toulouse à partir du milieu des années 90, l’escalade dans la ville rose se résumait au mur des Argoulets, aux voies des berges de la Garonne à côté du pont du Stadium, ou encore aux platanes au bord du canal du Midi…Il arrivait aussi fréquemment aux grimpeurs locaux d’aller ouvrir des traversées sur les briques des quais de la Daurade, site aujourd’hui interdit car classé patrimoine de Toulouse, ou de réaliser les ascensions du Pont Neuf ou du Pont des Catalans ! Une décennie plus tard, l’escalade urbaine refait surface à Toulouse, un nombre croissant de grimpeurs cherchant de nouveaux espaces de jeu.
Rencontre avec JB, grimpeur urbain toulousain qui nous présente cette autre approche de l’escalade, plus proche de ce que font les Yamakasi que de la pratique conventionnelle de la grimpe.
MARCASSIN : Qu’est-ce que la grimpe urbaine ?
A travers le processus d’urbanisation, l’homme rogne sans cesse sur la nature. La grimpe urbaine se présente en quelque sorte comme une alternative vis-à-vis de cette agression contre le biotope, dans la mesure où le grimpeur se réapproprie le mobilier urbain, un peu dans l’esprit d’un retour aux sources. C’est alors un moyen pour ne pas oublier la permanence de la nature humaine, dans une société soumise aux constantes évolutions technologiques et matérielles. Plus concrètement, on peut considérer que ce style de pratique se décompose en deux branches : tout d’abord, on trouve le solo (ndlr : le solo est l’escalade sans corde où le grimpeur évolue sans assurer sa sécurité, ce qui fait qu’en cas de chute il risque d’y laisser la peau !) sur des immeubles ou gratte-ciel à l’instar de spécialistes comme Alain Robert, qui considère la ville comme une montagne. Ce dernier comptabilise maintenant un paquet de réalisations marquantes, comme l’Arche de la Défense à Paris par exemple. Nous, nous pratiquons plutôt du bloc urbain (ndlr : le bloc, c’est la pratique de l’escalade non encordée amis sur une hauteur « raisonnable »), la ville signifiant pour nous un vaste chaos de blocs. Les passages ouverts peuvent atteindre les 10 mètres de haut et font en moyenne 6 à 7 mètres. Ce sont des lignes qui interpellent le regard par leur perfection, avec des prises de réception évidentes à saisir en fin de parcours qui fixent la cible à atteindre.
MARCASSIN : Quelle éthique et quelle réglementation concernant la grimpe urbaine ?
Il n’est pas, bien sûr, question de faire n’importe quoi. C’est pour cela que j’ai rédigé une sorte de charte intitulée « les 10 commandements du grimpeur urbain » ; elle constitue comme une ligne de conduite à adopter, un cadre de référence. Par exemple, l’un des items est l’interdiction de grimper sur les édifices religieux ou historiques et autres chefs-d’œuvre architecturaux. Pour ce qui est de la réglementation, la grimpe n’est pas interdite du moment que l’on n’enfreint pas la règle de la propriété privée en pénétrant sur les balcons par exemple, et aussi si l’on ne laisse aucune trace après son passage comme la magnésie (ndlr : sorte de talc que mettent les grimpeurs sur les mains pour mieux adhérer au mur et qui laisse des traces blanches) ou encore les traces de gomme de chaussons, qui génèreraient des problèmes de dégradation du mobilier urbain. Pour ne pas trop troubler l’ordre public, nous pratiquons plutôt le soir en semaine, un peu à l’abri des regards, en suivant un parcours de blocs défini à l’avance à travers le centre-ville de Toulouse, itinéraire que l’on emprunte en roller ou en vélo avec le crash-pad (ndlr : gros tapis de réception portable utilisé pour protéger les chutes éventuelles) sur le dos ! La police nous a à maintes reprises observé, mais n’est jamais intervenue. De même parmi les passants et les habitants rencontrés, aucun n’a jamais signalé la moindre gêne en nous voyant évoluer. Si c’était le cas, on irait ailleurs, il y a tellement à grimper à Toulouse !
MARCASSIN : Quelle est la spécificité de la grimpe à Toulouse ? Quels quartiers affectionnes-tu particulièrement ?
Ce qui fait le charme de Toulouse, c’est les briquettes rouges si caractéristiques de la ville, que l’on trouve à chaque coin de rue. Elles sont de différentes tailles selon l’état de rénovation du bâtiment, avec des jointures plus ou moins profondes. On trouve aussi beaucoup de vieilles pierres au toucher agréable, des murs munis d’un revêtement anti-tag rendant l’adhérence précaire, des colonnes arrondies et des piliers souvent très techniques. En fait, j’apprécie tout bâtiment où l’architecte s’est livré à de petites fantaisies donnant lieu à une escalade hors du commun. J’aime particulièrement les alentours du centre commercial Compans-Caffarelli avec ses bâtiments très modernes en verre. J’y ai quelques projets, des blocs bien durs que je n’ai pas encore réussi à faire. Et à chaque fois que je vais faire du repérage, j’y trouve une multitude de nouveaux problèmes à résoudre.
MARCASSIN : Enfin, quel est le profil-type du grimpeur urbain toulousain ?
C’est une personne qui possède un minimum de pratique en bloc et en escalade de manière à pouvoir s’amuser sans être contrainte par ses capacités techniques. Mais c’est aussi une personne qui aime grimper pour le plaisir et découvrir de nouvelles sensations et horizons, dotée d’une ouverture d’esprit suffisamment large pour pouvoir s’engager vers l’inconnu sans a priori. Enfin, c’est aussi quelqu’un de bon esprit, tourné vers les autres, que ce soit envers les passants, les habitants ou les autres grimpeurs du groupe.
Pour en savoir plus :
Si l’envie d’essayer vous en dit, le magnifique site de JB où vous trouverez absolument tout sur la grimpe urbaine, la rubrique vidéo est carrément excellente : www.urban-climbing.com
Concernant la grimpe urbaine toulousaine, on y trouve notamment les dates des sorties et le topo des principaux blocs répertoriés dans la ville, photo à l’appui ! A noter que la grimpe urbaine se développe partout en France, puisque des groupes très actifs existent aussi à Montpellier, Grenoble, Paris, le Mans, Dijon ou Nice !
Toutes les photos sont signées jb:
www.urban-climbing.com
Photos (Cliquez dessus pour les agrandir)

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