Devildriver fait partie de ces groupes qu'on suit plutôt distraitement car on sait toujours plus ou moins à quoi s'attendre à chaque sortie d'album, quand bien même certains opus nous interpellent plus que d'autres ("The Fury of Our Maker's Hand" par exemple). Par contre, on n'hésite jamais à aller se prendre une belle mandale lorsque leur tour-bus fait escale près de chez nous, car Devildriver en live, c'est l'assurance d'une soirée pogos et circle-pits à gogo. "Pray For The Vilains" (2009) ne m'ayant pas laissé un souvenir impérissable, c'est donc avec une certaine nonchalance que je me suis penché sur ce déjà cinquième album des californiens… Et la claque n'en fut que plus conséquente !

Même si on ne peut pas qualifier Devildriver de groupe le plus original de la planète, il faut bien lui concéder une personnalité plutôt affirmée notamment grâce à la voix de son hurleur. "Beast" ne déroge pas à la règle et offre son lot de hurlements caractéristiques de Dez Fafara, de rythmiques décapantes et de riffs décoiffants. Devildriver fait du Devildriver et il le fait très bien sur cet album. La plupart des morceaux tapent dans le mille grâce à des refrains entêtants et des plans de batterie ou de guitares tout simplement mortels. Outre l'opener "Dead To Rights" bien à sa place en début d'album avec son riff impeccable, on retiendra vite les hits en puissance que sont "You Make Me Sick" ou "Hardened" qui feront à coup sûr un carton en live. Au rayon tuerie, impossible de ne pas citer la boucherie "Bring The Fight (To the Floor)" sur lequel John Boecklin mitraille des blast-beats incandescents et une syncope dévastatrice sur un refrain qui comme le nom du titre l'indique lancera aisément quelques bastons dans les pits du monde entier. Une fois de plus le batteur insuffle une véritable valeur ajoutée à la musique des américains de par une virtuosité toujours plus flagrante. Cependant ne parler que du talent du batteur ne serait pas rendre justice au beau travail fourni par les deux guitaristes qui s'en donnent à cœur joie avec des riffs ciselés ("Shitlist") mais aussi des soli aux harmonies doubles que ne renierait pas Machine Head sur "The Blackening" ("Lend Myself To The Night"). L'apport mélodique de Jeff Kendrick et Mike Spreitzer se fait d'autant plus entendre par des petits thèmes bienvenus ("Coldblooded"). Il va s'en dire que cela fait bien longtemps (depuis Coal Chamber ?) que l'ami Dez Fafara a abandonné le chant clair au profit de hurlements toujours plus profonds tout juste nuancés par quelques chuchotements sur le pont de "Black Sour Choice". De plus, ce dernier ne gagnera pas un Pulitzer pour ses textes mais l'intention et la rage avec laquelle il beugle ses paroles ne fait aucun doute quand à l'intégrité du bonhomme.
Le tout est soutenu par une production moderne et exempte de tous reproches signé Mark Lewis (All That Remains, Trivium, The Black Dahlia Murder…), quelque part entre Chimaira et Lamb Of God.

Au final, il n'y a vraiment pas grand-chose à reprocher à ce cinquième album des californiens. Certes, ils ne réinventent pas leur musique avec cet effort mais "Beast" à au moins le mérite de présenter une version bien aboutie du son Devildriver avec des morceaux qui vont se tailler la part du lion dans les futures setlists du combo. A bien y regarder, n'est ce pas là tout ce qu'on demande à un groupe comme Devildriver ?


Tracklist
1. Dead To Rights
2. Bring The Fight (To The Floor)
3. Hardened
4. Shitlist
5. Coldblooded
6. You Make Me Sick
7. Talons Out (Teeth Sharpened)
8. Blur
9. The Blame Game
10. Black Soul Choir
11. Crowns Of Creation
12. Lend Myself To The Night